Histoire d’une maison de famille depuis le 16ème siècle
Notre famille jouit d’un bien précieux dans un monde qui perd ses repères : connaître ses racines et leur histoire sur 17 générations depuis le 14ème siècle. Sur ces 17 générations, 12 d’entre elles ont habité sans discontinuité notre maison de Linceuil depuis la fin du 16ème siècle. Seuls trois patronymes se sont succédé:
Les LESPINE, depuis le 16ème siècle jusqu’à la moitié du 18ème siècle :
- Helies de Lespine;
- Jean de Lespine,
- Etienne de Lespine,
- Jean de Lespine,
- Jean Lespine,
Les PAJOT-LAFORET, de la moitié du 18ème siècle jusqu’à la moitié du 19ème siècle :
- Francoise Lespine épouse Pierre Pajot-Laforet
- Jean Pajot Laforet
Les GAUSSEN, depuis la moitié du 19ème siècle jusqu’à aujourd’hui :
- Marie Pajot Laforet épouse Jean-Louis dit Audoin Gaussen
- Felix Justin Gaussen
- Georges Gaussen (propriétaire mais n’y habitant pas)
- Jean Gaussen (co-propriétaire mais n’y habitant pas)
- Jean-Louis Gaussen
Les Lespine : une vieille famille de Grignols connue depuis le 14ème siècle
Au 14ème siècle, les Lespine appartiennent à une vieille famille catholique de notables vivant à Grignols. Les archives que nous possédons permettent de trouver leur trace jusqu’en 1352 et d’établir un lien de filiation continue de Guillaume de Lespine à la fin du 15ème siècle jusqu’aux Gaussen d’aujourd’hui. A cette époque lointaine, les hommes de la famille sont juges, notaires, clercs ou prêtres. Il n’y a aucun commerçant ni artisan. A la fin du 14ème siècle, la profession de juge apparaît dans la famille Lespine. Par la suite, cette profession s’inscrit dans les gènes familiaux, car elle perdure, toujours à Grignols, jusqu’à la fin du 16ème siècle. En 1521, Poncet de Lespine fait construire à Bruc (à côté de Grignols) la chapelle de Saint Sebastien ainsi qu’une pile de l’église et Léonard de Lespine pose, enfant, la première pierre de cette même église.
Helies de Lespine et sa femme Anne s’installent dans la maison en 1595 après la fin de la guerre entre protestants et catholiques
Le 25 juillet 1593, Henri de Navarre, prince protestant, devient roi de France et se convertit au catholicisme en la basilique de Saint Denis (« Paris vaut bien une messe » aurait-il dit). Après des décennies de luttes sanglantes entre catholiques et protestants la paix s’installe alors dans le pays. En Périgord, la lutte entre les deux communautés religieuses dure depuis 1545 : 40 ans de combats, de pillage et de meurtres. Le nouveau roi recommande aux habitants du Périgord « de ne rien retenir en leur cœur des aigreurs et des animosités passées ».
Malgré ces affrontements, le 1er novembre 1594, Helies de Lespine, catholique et juge de Grignols, épouse une protestante, Anne Chaussade. En 1595, les deux époux s’installent dans la maison de Linceuil. Cependant, seuls les membres de la famille d’Anne signent l’acte de mariage. L’absence de la famille d’Helies est sans doute le reflet de sa réprobation à l’égard de ce mariage célébré au temple. Helies et Anne font baptiser leur premier enfant à l’église et le deuxième au temple marquant sans doute leur volonté d’effacer les anciennes querelles entre protestants et catholiques.
Depuis cette époque jusqu’à aujourd’hui, les générations successives de la famille habitent la maison de Linceuil sans discontinuité. Les archives sont conservées précieusement. L’image ci-dessous montre la signature d’Helies sur un acte du 1er avril 1607.

Signature de Helies de Lespine, le premier habitant de Linceuil, sur un acte du 1er avril 1607
La date de construction de la maison
Helies et Anne s’installent à Linceuil en 1595. Il est plus que probable que la maison dans laquelle s’installent les jeunes mariés est déjà vieille d’environ un siècle. En effet, après la guerre qui oppose français et anglais depuis plus de cent ans, la deuxième moitié du 15ème siècle et le début du 16ème siècle sont caractérisés par un formidable développement économique et une prospérité qui gagne toutes les régions. Partout, on restaure et on construit. Au début du 16ème siècle, c’est la renaissance.
Deux détails architecturaux permettent de situer dans le temps, de façon fiable, la partie la plus ancienne de la maison constituée des pièces qui servent, à l’heure actuelle, de cuisine et de bureau.
- Le premier réside dans l’observation du mur qui sépare la cuisine du salon. En effet, il est manifeste que ce mur est, au moment de sa construction, un mur de façade extérieure (le bâtiment de deux étages qui abrite l’actuel salon et les chambres au-dessus n’existant pas à l’époque) car il est doté d’une fenêtre. Or, les fenêtres ouvrent toujours sur l’extérieur et non sur une pièce intérieure ! Le linteau de cette fenêtre est décoré de la triple accolade qui est caractéristique de la deuxième moitié du 15ème siècle.

Sur cette même façade, il existe également une porte (dans le placard qui abrite la télévision) dont le linteau est décoré d’une accolade simple (l’accolade n’est pas visible car elle est cachée par la télévision). Les portes intérieures n’étant pas décorées de ce détail, on peut également conclure qu’il s’agissait d’une porte extérieure dont la modénature confirme l’époque. Les murs de la cuisine actuelle constituent donc l’ossature de la construction initiale.
- Le deuxième élément est lié à la poutraison du plafond de la cuisine qui est constitué uniquement de grosses poutres parallèles les unes aux autres. Cette conception est également caractéristique des constructions de cette époque. Ce n’est qu’à partir du 16ème siècle qu’apparait un nouveau schéma constitué de 2 grosses poutres principales perpendiculaires à un ensemble de solives de plus petite section (plafond dit « à la française »).

Ainsi, il est quasiment certain que la partie la plus ancienne de la maison date de la deuxième moitié du 15ème siècle ou des premières décennies du 16ème siècle.
La maison s’agrandit à chaque génération
Lorsqu’Helies et Anne s’installent dans la maison en 1595, cette dernière est sans doute trop petite. Il est probable qu’Helies décide donc d’agrandir la maison pour installer sa famille plus confortablement. Il ne peut le faire ni vers le Nord ni vers le Sud puisque des bâtiments agricoles existent déjà des deux côtés. Il ne peut pas non plus le faire vers l’Ouest puisqu’un ruisseau venant de la fontaine située au Nord de la maison (de l’autre côté de la route actuelle) coule le long de la maison en alimentant plusieurs mares. La seule possibilité est donc d’agrandir la maison vers l’Est.
Helies fait donc construire au tout début du 17ème siècle un nouveau bâtiment, adossé à la maison d’origine et constitué d’une cuisine (le salon actuel) et d’une chambre à l’étage (la chambre principale actuelle). L’ancienne porte d’entrée est murée ainsi que la petite fenêtre à triple accolade. Une nouvelle porte de communication (la porte actuelle) est créée entre la pièce initiale et la nouvelle cuisine. La porte d’entrée se trouve désormais en partie centrale de la façade Est à l’emplacement du placard mural Louis XV. Cette pièce est dotée d’un évier toujours visible côté Sud, d’une petite fenêtre carrée au-dessus de l’évier et d’une cheminée (la cheminée actuelle). A cette époque, le mur qui sépare le salon actuel du hall d’entrée venant de la terrasse est donc un mur de façade extérieure.
Puis, la maison est à nouveau agrandie, sans doute au cours de la deuxième moitié du 17ème siècle, toujours en direction de l’Est. Les pièces correspondant au hall d’entrée et à la salle à manger actuels sont ainsi rajoutées. La présence d’une fenêtre (au niveau du grenier) dans le mur séparant l’actuelle salle à manger de la chambre de Marion atteste que ce mur est, à son tour, un mur de façade extérieure.
Enfin, la dernière partie de la maison d’habitation est construite au 18ème siècle. Elle correspond à l’actuelle chambre de Marion qui était à l’époque une cuisine dont témoigne le potager toujours présent à côté de la cheminée. Un évier existait également au niveau de la porte donnant accès à la salle de bains de cette chambre. L’année 1746 inscrite sur le manteau de la cheminée témoigne que cette pièce est donc la partie la plus jeune de la maison.

Il est probable que le pigeonnier et son four à pain ont également été construits au 18ème siècle.
Au 19ème siècle Justin Felix Gaussen, maire de Neuvic, fait construire une grange à deux étables avec grenier à foin. Ce bâtiment correspond au garage actuel. La date 1870 inscrite sur la clef de voute de l’arc en pierre de l’entrée principale ainsi que le traitement des pierres d’angles du portail de la grange témoignent de cette époque.

Au même moment la façade de la maison est « modernisée » et mise au gout du moment. Les pierres d’encadrement de la porte d’entrée sont pourvues d’un décor avec corniche typique du 19ème siècle et les appuis des trois fenêtres de la maison basse sont changés dans un souci de cohérence d’ensemble.
Les travaux récents
En 1880 Justin Felix Gaussen fait construire une nouvelle maison de l’autre côté de la route. Il s’y installe avec sa famille délaissant le berceau familial qui se dégrade alors progressivement. En 1979, Jean-Louis Gaussen entreprend un vaste programme de rénovation intérieure et extérieure de la maison.
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